EPIGENETIQUE ET DON D'OVOCYTES
- kdosceki
- 7 mai
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Dernière mise à jour : 13 mai
Par Léa KARPEL (Magazine fertilemag)
Ce refrain de la fameuse chanson de Vianney : « Il n’y a pas que les gènes qui font la famille
» célèbre la famille recomposée et l’affection qui y circule. En écho, répond la chanson de
Johnny Halliday « sang pour sang », où il clame sa grande ressemblance physique avec son
fils tout en reconnaissant qu’il n’a jamais su s’occuper de ce dernier, ni répondre à ses
attentes paternelles.
Dans le cadre d’un don de gamètes, ces questions de génétique, de ressemblance, de
transmission, de bons soins parentaux sont essentielles à résoudre avant de se lancer dans
l’aventure. En effet, pour certains, construire une famille sans la participation de ses
propres gènes peut être l’unique solution pour devenir parent.
Nous nous représentons la famille comme la résultante de l’union de deux adultes aimants
qui partagent le désir d’élever ensemble leurs enfants. Cette représentation occidentale de
la famille s’apparente à l’image d’Epinal d’un père, d’une mère et de deux enfants.
Seulement, les moeurs ont évolué.
Les couples se séparent et les familles se recomposent. Longtemps, le divorce a signifié
pour les femmes se retrouver seules à élever dans la difficulté des enfants dont le père
avait cessé de se préoccuper au quotidien. Puis, les pères se sont davantage positionnés. Ils
ont réclamé des droits de garde plus fréquents de leur enfant. Aussi, la famille a de
nombreux visages aujourd’hui : des pères et des mères ensemble, seuls, ou unis à un autre
adulte, vivant avec un ou plusieurs enfants, dans le même logement, composent une
famille.
Aussi, il ne suffit pas de donner son patrimoine génétique (des hommes et des femmes
abandonnent des enfants), ni de vivre sous le même toit (des colocataires ne forment pas
une famille) pour constituer une famille.
Le strict minimum pour faire famille serait qu’un adulte aimant souhaite élever, chérir,
soigner et éduquer un enfant et que cette responsabilité lui incombe durant toute sa vie.
En quoi les gènes participent de cette responsabilité ?
Il est des familles où il n’existe pas d’amour entre les êtres et tous ses membres en sont
terriblement malheureux. Par conséquent, la famille se délite, ses membres s’éloignent et
la famille disparaît. D’autres adultes censés être parents sont irresponsables. Les carences
de soins, de préoccupations, et d’éducation transforment leurs enfants en des êtres
extrêmement fragiles, incapables de faire face à l’existence, au lien social, à la scolarité et à
la vie en général.
Si nous devions prétendre que la famille repose sur les gènes alors nous accepterions ces
dysfonctionnements sur l’autel de la génétique sacralisée. Or, la société protège ces
enfants de leurs « parents » dysfonctionnels. Les droits parentaux peuvent être retirés et
ces enfants sauvés des maltraitances et de la folie.
Par conséquence, la transmission génétique ne dit rien des capacités parentales, de
l’amour parental ni du bonheur familial.
Ontologiquement, la reproduction était la seule façon de construire une famille. Aussi, la
famille ne pouvait être considérée autrement que constituée par les gènes. L’adoption est
un moyen récent historiquement pour constituer une famille. Quant au don de gamètes,
encore plus récent, il peine à s’installer dans l’inconscient collectif comme mode
reproductif ; le don d’ovocytes encore moins que le don de sperme.
Les gènes contenus dans les gamètes restent dans l’imaginaire social le seul moyen de
transmettre son capital à son enfant. Or, que signifie transmettre son capital… son capital
sympathie, son capital financier, son capital intellectuel ? Bref, que reste-t-il à régler avec
la génétique lorsque l’on devient parent grâce à un don de gamètes?
Il reste la ressemblance physique. Il s’agit d’un point incontournable dans le choix de la
procréation avec donneur. La génétique participe de la ressemblance entre membres d’une
même famille. Et encore ce point est discutable, car de nombreux frères et soeurs ne se
ressemblent absolument pas. Chacun des membres de la famille emprunte des traits à l’un
ou l’autre des parents ou des grands-parents sans qu’il s’agisse de clones physiques, ni
psychiques. Cependant, l’éventualité d’une dissemblance entre le parent infertile et l’enfant
est la plus probable avec le don de gamètes. Il faudra l’accepter, même si l’épigénétique
entraînera sans doute l’apparition chez l’enfant d’un trait caractéristique de votre physique
: une fossette, une tâche de naissance ou autre point visible ou invisible de votre
physionomie.
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La psychologie nous enseigne que derrière chaque désir d’enfant se cache un désir de
reproduction de soi. Aussi, les femmes imaginent elles plus fréquemment avoir une fille et
les hommes un garçon. Et ce afin d’avoir le plaisir de se retrouver dans les traits d’un «
mini-moi » qui aurait la possibilité de réaliser ce que l’on n’a pas réussi soi-même. L’enfant
serait alors une version améliorée de soi et Il n’est pas facile de se défaire de ce doux rêve.
Quelle part de différence chez l’enfant peut-on tolérer ? Quel besoin avons-nous de nous
retrouver physiquement puis psychologiquement dans notre enfant ? En effet, ça n’est pas
seulement de ressemblance physique dont il s’agit mais aussi de ressemblance sociale,
économique, intellectuelle ou politique. Pourquoi un enfant qui pense autrement, qui sort
de son milieu religieux, économique ou social, suscite tant de rejet parfois chez sa famille ?
Parce qu’on refuse l’altérité. On préfère ce que l’on connaît déjà. On veut du semblable, que
rien ne change vraiment d’une génération à l’autre. Or, enfanter permet de se continuer
mais aussi de créer un autre, strictement différent de soi.
Quel risque de rejet de l’enfant serait à l’oeuvre si la part inconnue de la donneuse est
déniée dans la procréation ? Il faut s’interroger sur la part de soi à transmettre et celle
prête à être abandonnée pour devenir parent.
Il faut accepter que nos gènes ne participent pas à la conception de notre enfant et que
cela va entraîner des modifications dans la physionomie de ce dernier ; tout en s’assurant
de l’aimer malgré le risque de dissemblance physique et compter sur sa propre capacité
d’amour, de joie et de partage avec son enfant.
Ce ne sera donc pas l’usage d’un don de gamètes qui perturberait un enfant à venir mais
bien le rejet de son parent. Ce n’est pas la présence d’unes donneur/se qui perturberait un
enfant mais l’impossibilité de son parent à l’aimer. Ce n’est pas l’anonymat ou pas d’un.e
donneur/se qui perturberait l’enfant mais l’idée que quelqu’un d’autre pourrait l’aimer car
son parent blessé par l’infertilité et rejetant n’y parvient pas. Aussi, dans la réflexion avant
le recours au don de gamètes, ne nous trompons pas d’objet de réflexion. Il s’agit d’abord et
avant tout d’accepter d’avoir perdu la capacité à se reproduire par ses propres gamètes afin
d’accepter d’utiliser les gamètes d’un ou une donneur/se.
Comptons sur les enfants conçus par don de gamètes pour se faire aimer de leur parent et
apaiser les craintes de ces derniers en réveillant et suscitant leur amour parental.
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